dimanche 3 février 2008

Mobilisation


Châtel-Guyon, 1er septembre 1939. Il est 15h00, le soleil brille et les feuilles des arbres font passer une légère brise sur l'avenue Baraduc.

A la terrasse de l'Hôtel de France, de nombreux clients sont attablés, qui devant un demi de bière, qui devant un café ou un thé. Maurice s'affaire au comptoir tout en écoutant les bavardages qui vont bon train. Il faut dire que depuis quelques jours, c'est le même sujet de conversation: la guerre.

La femme d'un député Front Populaire de la région, et quelques officiers curistes, claironnent que la guerre est inévitable. On parle beaucoup, bien sûr, de l'invasion de la Pologne par l'armée Allemande d'Hitler, mais aussi du pacte de non agression "Germano-Soviétique", conclu entre Hitler et Staline.

Tout à coup, un grand silence se fait au milieu de la chaussée. Le crieur municipal, à califourchon sur son vélo, à l'arrêt, bat du tambour. Tout le monde se tait et écoute: c'est la mobilisation générale ! Cette fois, ça y est ! Il n'y a plus de doute, c'est bien la guerre.

Un peu plus tard dans la soirée, des affiches blanches avec deux drapeaux tricolores imprimés, annoncent l'ordre de la mobilisation générale.

Les gens n'ont pas l'air trop surpris. On s'y attendait, les plus optimistes disent "La mobilisation générale n'est pas la guerre". Dans l'ensemble, la plupart n'y croient pas. Ils trouvent cela impossible. Mais les faits sont là, et il faut répondre à l'ordre de mobilisation. L'Hôtel de France était tenu par deux associés. L'un faisait la cuisine, l'autre le maître d'hôtel. Leur fascicule de mobilisation leur intime l'ordre de partir rapidement et sans délai. Il faut donc fermer l'hôtel le jour même. Maurice est congédié bien entendu, et se promène en ville à la nuit tombée. Il est reconnu par d'anciens camarades qui avaient travaillé avec lui deux ans plus tôt, dans autre hôtel tenu par un Croix-de-Feu. Dès qu'ils l'aperçoivent, ils l'insultent, en le traitant de sale communiste qui a sa place en prison, en attendant les douzes balles dans la peau. Maurice décide de partir sans tarder et rejoint Riom, la ville la plus proche pour prendre le train en direction de Clermont-Ferrand. A la gare, il aperçoit des trains complets qui partent en direction de Saint-Germain-des-Fossés, vers le front. Trains de militaires criant joyeusement : "A la boucherie, à Berlin". Convois de matériel ayant servi à la guerre de 14-18 : wagons plats chargés de canons montés sur caissons, "charettes fouragères", ravitaillement et surtout du foin pour les chevaux. D'autres wagons de marchandises, ouverts ceux-là, marqués : Hommes 40 - Chevaux en long 8. Les derniers transportent les hommes de troupe et les chevaux.

Le spectacle est triste à voir, et malgré l'insouciance de cette jeunesse qui part au sacrifice, les larmes viennent aux yeux.



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